• Poème pour Claire de Victor Hugo

    Victor Hugo eut une double vie et beaucoup de maîtresses.

    Madame Fouchère dite Adèle Hugo, Adèle Julie Victoire Marie Foucher, née le 27 septembre 1803 et morte le 27 août 1868 à Bruxelles, à 64 ans, fut l'épouse "légitime" de Victor Hugo. Ils eurent ensemble Léopold Victor Hugo (16 juillet 1823 - 10 octobre 1823) Léopoldine Cécile Marie Pierre Catherine Hugo (28 août 1824 - 4 septembre 1843) Charles Hugo (4 novembre 1826 - 13 mars 1871) François-Victor Hugo (28 octobre 1828 - 26 décembre 1873) et Adèle Hugo (24 août 1830 - 21 avril 1915).

    Poème pour Claire de Victor Hugo

    Juliette Drouet Julienne Gauvain, dite (1806-1883) actrice française. Fut la compagne de Victor Hugo de 1833 à 1883 année de la mort de Juliette, durant toutes ces années Adèle reste son épouse. Victor Hugo mourait deux ans plus tard.

    Poème pour Claire de Victor Hugo

    Victor Hugo eut deux filles, Léopoldine Cécile Marie-Pierre Catherine Hugo, née le 28 août 1824 et morte noyée le 4 septembre 1843 à l'âge de 19 ans elle venait de se marier.

    Poème pour Claire de Victor Hugo

    Adèle Hugo née le 28 juillet 1830 - décédée le 21 avril 1915, cinquième enfant et la seconde fille de Victor Hugo et d'Adèle Foucher appelée aussi Adèle Hugo, la seule qui survécut à son illustre père mais dont l'état mental, très tôt défaillant, lui valut, à partir de 1872, de longues années en maison de santé.

    Poème pour Claire de Victor Hugo

    Claire était la fille de Juliette née en 1826 de l'union de Juliette Drouet et Jacques Pradier, sculpteur. Victor Hugo aimait Claire comme sa propre fille. Elle mourut en 1846 à l'âge de 20 ans de tuberculeuse.

    Poème pour Claire de Victor Hugo

    Claire P.

    Quel âge hier ? Vingt ans. Et quel âge aujourd'hui ?
    L'éternité. Ce front pendant une heure a lui.
    Elle avait les doux chants et les grâces superbes ;
    Elle semblait porter de radieuses gerbes ;
    Rien qu'à la voir passer, on lui disait : Merci !
    Qu'est-ce donc que la vie, hélas ! pour mettre ainsi
    Les êtres les plus purs et les meilleurs en fuite ?
    Et, moi, je l'avais vue encor toute petite.
    Elle me disait vous, et je lui disais tu.
    Son accent ineffable avait cette vertu
    De faire en mon esprit, douces voix éloignées,
    Chanter le vague choeur de mes jeunes années.
    Il n'a brillé qu'un jour, ce beau front ingénu.
    Elle était fiancée à l'hymen inconnu.
    À qui mariez-vous, mon Dieu, toutes ces vierges ?
    Un vague et pur reflet de la lueur des cierges
    Flottait dans son regard céleste et rayonnant ;
    Elle était grande et blanche et gaie ; et, maintenant,
    Allez à Saint-Mandé, cherchez dans le champ sombre,
    Vous trouverez le lit de sa noce avec l'ombre ;
    Vous trouverez la tombe où gît ce lys vermeil ;
    Et c'est là que tu fais ton éternel sommeil,
    Toi qui, dans ta beauté naïve et recueillie,
    Mêlais à la madone auguste d'Italie
    La Flamande qui rit à travers les houblons,
    Douce Claire aux yeux noirs avec des cheveux blonds.

    Elle s'en est allée avant d'être une femme ;
    N'étant qu'un ange encor ; le ciel a pris son âme
    Pour la rendre en rayons à nos regards en pleurs,
    Et l'herbe, sa beauté, pour nous la rendre en fleurs.

    Les êtres étoilés que nous nommons archanges
    La bercent dans leurs bras au milieu des louanges,
    Et, parmi les clartés, les lyres, les chansons,
    D'en haut elle sourit à nous qui gémissons.
    Elle sourit, et dit aux anges sous leurs voiles :
    Est-ce qu'il est permis de cueillir des étoiles ?
    Et chante, et, se voyant elle-même flambeau,
    Murmure dans l'azur : Comme le ciel est beau !
    Mais cela ne fait rien à sa mère qui pleure ;
    La mère ne veut pas que son doux enfant meure
    Et s'en aille, laissant ses fleurs sur le gazon,
    Hélas ! et le silence au seuil de la maison !

    Son père, le sculpteur, s'écriait : - Qu'elle est belle !
    Je ferai sa statue aussi charmante qu'elle.
    C'est pour elle qu'avril fleurit les verts sentiers.
    Je la contemplerai pendant des mois entiers
    Et je ferai venir du marbre de Carrare.
    Ce bloc prendra sa forme éblouissante et rare ;
    Elle restera chaste et candide à côté.
    On dira : - Le sculpteur a deux filles : Beauté
    Et Pudeur ; Ombre et Jour ; la Vierge et la Déesse ;
    Quel est cet ouvrier de Rome ou de la Grèce
    Qui, trouvant dans son art des secrets inconnus,
    En copiant Marie, a su faire Vénus ?

    Le marbre restera dans la montagne blanche,
    Hélas ! car c'est à l'heure où tout rit, que tout penche ;
    Car nos mains gardent mal tout ce qui nous est cher ;
    Car celle qu'on croyait d'azur était de chair ;
    Et celui qui taillait le marbre était de verre ;
    Et voilà que le vent a soufflé, Dieu sévère,
    Sur la vierge au front pur, sur le maître au bras fort ;
    Et que la fille est morte, et que le père est mort !
    Claire, tu dors. Ta mère, assise sur ta fosse,
    Dit : - Le parfum des fleurs est faux, l'aurore est fausse,
    L'oiseau qui chante au bois ment, et le cygne ment,
    L'étoile n'est pas vraie au fond du firmament,
    Le ciel n'est pas le ciel et là-haut rien ne brille,
    Puisque, lorsque je crie à ma fille : - Ma fille,
    Je suis là. Lève-toi ! - quelqu'un le lui défend ;
    Et que je ne puis pas réveiller mon enfant !

    Victor Hugo
    Les contemplations

     

    Claire

    Quoi donc ! la vôtre aussi ! la vôtre suit la mienne !
    O mère au coeur profond, mère, vous avez beau
    Laisser la porte ouverte afin qu'elle revienne,
    Cette pierre là-bas dans l'herbe est un tombeau !

    La mienne disparut dans les flots qui se mêlent ;
    Alors, ce fut ton tour, Claire, et tu t'envolas.
    Est-ce donc que là-haut dans l'ombre elles s'appellent,
    Qu'elles s'en vont ainsi l'une après l'autre, hélas ?

    Enfant qui rayonnais, qui chassais la tristesse,
    Que ta mère jadis berçait de sa chanson,
    Qui d'abord la charmas avec ta petitesse
    Et plus tard lui remplis de clarté l'horizon,

    Voilà donc que tu dors sous cette pierre grise !
    Voilà que tu n'es plus, ayant à peine été !
    L'astre attire le lys, et te voilà reprise,
    O vierge, par l'azur, cette virginité !

    Te voilà remontée au firmament sublime,
    Échappée aux grands cieux comme la grive aux bois,
    Et, flamme, aile, hymne, odeur, replongée à l'abîme
    Des rayons, des amours, des parfums et des voix !

    Nous ne t'entendrons plus rire en notre nuit noire.
    Nous voyons seulement, comme pour nous bénir,
    Errer dans notre ciel et dans notre mémoire
    Ta figure, nuage, et ton nom, souvenir !

    Pressentais-tu déjà ton sombre épithalame ?
    Marchant sur notre monde à pas silencieux,
    De tous les idéals tu composais ton âme,
    Comme si tu faisais un bouquet pour les cieux !

    En te voyant si calme et toute lumineuse,
    Les coeurs les plus saignants ne haïssaient plus rien.
    Tu passais parmi nous comme Ruth la glaneuse ,
    Et, comme Ruth l'épi, tu ramassais le bien.

    La nature, ô front pur, versait sur toi sa grâce,
    L'aurore sa candeur, et les champs leur bonté ;
    Et nous retrouvions, nous sur qui la douleur passe,
    Toute cette douceur dans toute ta beauté !

    Chaste, elle paraissait ne pas être autre chose
    Que la forme qui sort des cieux éblouissants ;
    Et de tous les rosiers elle semblait la rose,
    Et de tous les amours elle semblait l'encens.

    Ceux qui n'ont pas connu cette charmante fille
    Ne peuvent pas savoir ce qu'était ce regard
    Transparent comme l'eau qui s'égaie et qui brille
    Quand l'étoile surgit sur l'océan hagard.

    Elle était simple, franche, humble, naïve et bonne ;
    Chantant à demi-voix son chant d'illusion,
    Ayant je ne sais quoi dans toute sa personne
    De vague et de lointain comme la vision.

    On sentait qu'elle avait peu de temps sur la terre,
    Qu'elle n'apparaissait que pour s'évanouir,
    Et qu'elle acceptait peu sa vie involontaire ;
    Et la tombe semblait par moments l'éblouir.

    Elle a passé dans l'ombre où l'homme se résigne ;
    Le vent sombre soufflait ; elle a passé sans bruit,
    Belle, candide, ainsi qu'une plume de cygne
    Qui reste blanche, même en traversant la nuit !

    Elle s'en est allée à l'aube qui se lève,
    Lueur dans le matin, vertu dans le ciel bleu,
    Bouche qui n'a connu que le baiser du rêve,
    Ame qui n'a dormi que dans le lit de Dieu !

    Nous voici maintenant en proie aux deuils sans bornes,
    Mère, à genoux tous deux sur des cercueils sacrés,
    Regardant à jamais dans les ténèbres mornes
    La disparition des êtres adorés !

    Croire qu'ils resteraient ! quel songe ! Dieu les presse.
    Même quand leurs bras blancs sont autour de nos cous,
    Un vent du ciel profond fait frissonner sans cesse
    Ces fantômes charmants que nous croyons à nous.

    Ils sont là, près de nous, jouant sur notre route ;
    Ils ne dédaignent pas notre soleil obscur,
    Et derrière eux, et sans que leur candeur s'en doute,
    Leurs ailes font parfois de l'ombre sur le mur.

    Ils viennent sous nos toits ; avec nous ils demeurent ;
    Nous leur disons : Ma fille, ou : Mon fils ; ils sont doux,
    Riants, joyeux, nous font une caresse, et meurent. -
    O mère, ce sont là les anges, voyez-vous !

    C'est une volonté du sort, pour nous sévère,
    Qu'ils rentrent vite au ciel resté pour eux ouvert ;
    Et qu'avant d'avoir mis leur lèvre à notre verre,
    Avant d'avoir rien fait et d'avoir rien souffert,

    Ils partent radieux ; et qu'ignorant l'envie,
    L'erreur, l'orgueil, le mal, la haine, la douleur,
    Tous ces êtres bénis s'envolent de la vie
    A l'âge où la prunelle innocente est en fleur !

    Nous qui sommes démons ou qui sommes apôtres,
    Nous devons travailler, attendre, préparer ;
    Pensifs, nous expions pour nous-même ou pour d'autres ;
    Notre chair doit saigner, nos yeux doivent pleurer.

    Eux, ils sont l'air qui fuit, l'oiseau qui ne se pose
    Qu'un instant, le soupir qui vole, avril vermeil
    Qui brille et passe ; ils sont le parfum de la rose
    Qui va rejoindre aux cieux le rayon du soleil !

    Ils ont ce grand dégoût mystérieux de l'âme
    Pour notre chair coupable et pour notre destin ;
    Ils ont, êtres rêveurs qu'un autre azur réclame,
    Je ne sais quelle soif de mourir le matin !

    Ils sont l'étoile d'or se couchant dans l'aurore,
    Mourant pour nous, naissant pour l'autre firmament ;
    Car la mort, quand un astre en son sein vient éclore,
    Continue, au delà, l'épanouissement !

    Oui, mère, ce sont là les élus du mystère,
    Les envoyés divins, les ailés, les vainqueurs,
    A qui Dieu n'a permis que d'effleurer la terre
    Pour faire un peu de joie à quelques pauvres coeurs.

    Comme l'ange à Jacob, comme Jésus à Pierre,
    Ils viennent jusqu'à nous qui loin d'eux étouffons,
    Beaux, purs, et chacun d'eux portant sous sa paupière
    La sereine clarté des paradis profonds.

    Puis, quand ils ont, pieux, baisé toutes nos plaies,
    Pansé notre douleur, azuré nos raisons,
    Et fait luire un moment l'aube à travers nos claies,
    Et chanté la chanson du ciel dam nos maisons,

    Ils retournent là-haut parler à Dieu des hommes,
    Et, pour lui faire voir quel est notre chemin,
    Tout ce que nous souffrons et tout ce que nous sommes,
    S'en vont avec un peu de terre dans la main.

    Ils s'en vont ; c'est tantôt l'éclair qui les emporte,
    Tantôt un mal plus fort que nos soins superflus.
    Alors, nous, pâles, froids, l'oeil fixé sur la porte,
    Nous ne savons plus rien, sinon qu'ils ne sont plus.

    Nous disons : - A quoi bon l'âtre sans étincelles ?
    A quoi bon la maison où ne sont plus leurs pas ?
    A quoi bon la ramée où ne sont plus les ailes ?
    Qui donc attendons-nous s'ils ne reviendront pas ? -

    Ils sont partis, pareils au bruit qui sort des lyres.
    Et nous restons là, seuls, près du gouffre où tout fuit,
    Tristes ; et la lueur de leurs charmants sourires
    Parfois nous apparaît vaguement dans la nuit.

    Car ils sont revenus, et c'est là le mystère ;
    Nous entendons quelqu'un flotter, un souffle errer,
    Des robes effleurer notre seuil solitaire,
    Et cela fait alors que nous pouvons pleurer.

    Nous sentons frissonner leurs cheveux dans notre ombre ;
    Nous sentons, lorsqu'ayant la lassitude en nous,
    Nous nous levons après quelque prière sombre,
    Leurs blanches mains toucher doucement nos genoux.

    Ils nous disent tout bas de leur voix la plus tendre :
    "Mon père, encore un peu ! ma mère, encore un jour !
    "M'entends-tu ? je suis là, je reste pour t'attendre
    "Sur l'échelon d'en bas de l'échelle d'amour.

    "Je t'attends pour pouvoir nous en aller ensemble.
    "Cette vie est amère, et tu vas en sortir.
    "Pauvre coeur, ne crains rien, Dieu vit ! la mort rassemble.
    "Tu redeviendras ange ayant été martyr."

    Oh ! quand donc viendrez-vous ? Vous retrouver, c'est naître.
    Quand verrons-nous, ainsi qu'un idéal flambeau,
    La douce étoile mort, rayonnante, apparaître
    A ce noir horizon qu'on nomme le tombeau ?

    Quand nous en irons-nous où vous êtes, colombes !
    Où sont les enfants morts et les printemps enfuis,
    Et tous les chers amours dont nous sommes les tombes,
    Et toutes les clartés dont nous sommes les nuits ?

    Vers ce grand ciel clément où sont tous les dictames,
    Les aimés, les absents, les êtres purs et doux,
    Les baisers des esprits et les regards des âmes,
    Quand nous en irons-nous ? quand nous en irons-nous ?

    Quand nous en irons-nous où sont l'aube et la foudre ?
    Quand verrons-nous, déjà libres, hommes encor,
    Notre chair ténébreuse en rayons se dissoudre,
    Et nos pieds faits de nuit éclore en ailes d'or ?

    Quand nous enfuirons-nous dans la joie infinie
    Où les hymnes vivants sont des anges voilés,
    Où l'on voit, à travers l'azur de l'harmonie,
    La strophe bleue errer sur les luths étoilés ?

    Quand viendrez-vous chercher notre humble coeur qui sombre ?
    Quand nous reprendrez-vous à ce monde charnel,
    Pour nous bercer ensemble aux profondeurs de l'ombre,
    Sous l'éblouissement du regard éternel ?

    Victor Hugo

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